À Micronora, trois technos de mesure prometteuses pour un meilleur contrôle de l'impression 3D
IT ALEXANDRE COUTO
Les techniques de mesure et de contrôle sont devenues des enjeux importants pour le développement de l’impression 3D en production. A l’occasion de l’événement virtuel e-Micronora, qui se tient du 22 au 25 septembre, une série de présentations a permis de faire le point sur trois technologies jugées prometteuses.
« L’impression 3D est une technologie qui challenge les méthodes de mesure traditionnelles », lance Jérôme Lopez, directeur technique du Collège français de métrologie, en préambule d’une série de webinaires organisée le 23 septembre à l’occasion du rendez-vous e-Micronora.
Ce salon dédié aux microtechniques, qui se tient cette année sous une forme dématérialisée, a choisi d’aborder au travers de trois présentations le sujet du contrôle qualité et de la mesure dans la fabrication additive. Objectif : mettre en avant les pistes les plus prometteuses sur un sujet qui prend une importance croissante.
« Les technologies d’impression 3D sont arrivées dans les usines pour produire des pièces finies complexes », rappelle Anne-Françoise Obaton, Ingénieur de recherche pour la fabrication additive au Laboratoire National de métrologie et d’essai (LNE) « La normalisation est un enjeu majeur car il est encore difficile de prédire dans le temps le comportement de ces pièces. Pour y parvenir, nous devons avoir des outils de mesure et de contrôle performants ».
La fabrication additive, qui consiste à produire une pièce en superposant des couches de matières selon diverses techniques, est en effet un procédé complexe. Des micro-variations et des cavités – dues à une mauvaise fusion de la matière par exemple – peuvent survenir dans la couche ou en surface. Ce phénomène peut nuire à la longévité et aux performances des pièces.
En outre, l’impression 3D est utilisée pour produire des pièces parfois dotées de structures creuses, lattices ou enchâssées, pour lesquelles les technologies d’inspection optique traditionnelles sont peu performantes.
« Pour garantir l’intégrité des pièces, il est impératif de mettre en place des techniques de contrôle non destructif capables d’inspecter la pièce dans son volume. Et de les adapter pour caractériser les défauts, comme la taille ou la nature des cavités », résume Anne-Françoise Obaton. Aujourd’hui, trois technologies sortent du lot.
La tomographie à rayon X, pour scruter le cœur des pièces
La tomographie à rayon X, inspirée des technologies de diagnostic médical, est aujourd’hui considérée comme l’une des techniques d’inspection en volume les plus performante. Elle consiste à placer la pièce sur un plateau rotatif et à effectuer une série de radios. Un algorithme de reconstruction permet ensuite de recréer la pièce en trois dimensions afin de pouvoir l’inspecter numériquement sous toutes ses coutures.
« Plus la source de rayons X est proche de la pièce, plus nous gagnons en résolution », explique Frank Thibault, responsable commercial des solutions X-Ray pour le constructeur d’équipements ZEISS « Il est possible d’augmenter cette résolution grâce à des microtomographes : une lentille optique est placée entre la pièce et la surface d’acquisition de la radio. L’image est agrandie comme dans un microscope ».
Une fois réalisée, la tomographie offre une très grande liberté d’inspection. L’opérateur peut sans difficulté scruter le cœur de la structure et atteindre des zones normalement inaccessibles. L’image 3D peut servir à effectuer les mesures nécessaires sur la pièce pour la caractériser.
Cette technique de contrôle et de mesure peut également être utilisée pour valider la conformité des poudres métalliques. « En plaçant la poudre dans le tomographe, il est possible de vérifier le diamètre et la sphéricité des particules de métal », précise Frank Thibault.
Mais bien que très performante, la tomographie a également son lot d’inconvénients. Premièrement, tous les matériaux ne sont pas égaux face aux rayons X et ceux à faible densité peuvent générer des artefacts sur l’image. « Les rayons peuvent traverser n’importe quelle matière, du carbone jusqu’au plomb. Dans le cas des matières peu denses, nous devons corriger l’image avec des réducteurs de bruit ou des algorithmes de reconstruction spéciaux », explique Frank Thibault.
Deuxième défaut : les limites des tomographes en termes de taille et de densité des pièces. Les pièces de grandes dimensions imprimées en 3D, qui font leur apparition notamment avec la technologie de dépôt par arc-fil (WAAM), sont exclues.
Dernier écueil, le coût d’acquisition de cette technologie : il faut compter plusieurs centaine de milliers d’euros pour s’équiper d’un tomographe. Certains constructeurs proposent des offres de services pour réaliser l’inspection, ce qui ne permet pas le contrôle en routine.
La spectroscopie par résonance acoustique, pour le contrôle en routine
Selon Anne-Françoise Obaton, la spectroscopie par résonance acoustique est une technologie qui offre de très bonnes performances, après la tomographie. Elle consiste à exciter mécaniquement la pièce – en la tapant avec un petit marteau ou en la laissant glisser sur un toboggan – et d’enregistrer les vibrations sous la forme d’un spectre de fréquences. Celui-ci est comparé au spectre d’une pièce de référence. Si les deux mesures divergent, la pièce doit contenir des défauts, en surface ou en interne.
« Nous avons testé cette méthode avec des pièces lattices, dont il manquait des branches de la structure à certaines », explique Anne-Françoise Obaton, nous avons pu identifier 100% des pièces défectueuses. »
A la différence de la tomographie, la spectroscopie par résonnance acoustique peut être utilisée quelles que soient la taille et la géométrie de la pièce. Elle est moins coûteuse et peut facilement être mise en place pour des contrôles post production en routine. Cependant, il s’agit d’une méthode globale, qui ne permet pas d’identifier et de caractériser le type de défaut présent dans la pièce.
La technologie confocale chromatique, pour l’inspection couche par couche
Présentée par la société STIL, basée à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), la technologie confoncale chromatique est un processus destiné à l’inspection rapide de la porosité en surface des pièces.
Le principe consiste à créer un faisceau lumineux polychromatique dont chaque longueur d’onde se focalise parfaitement à une position précise. « Ceci revient à créer une règle optique dont chaque couleur correspond à une distance. », explique Patrice Belin, directeur des ventes de STIL. Un crayon optique permet de projeter le faisceau coloré vers la surface qui va lui retourner, par réflexion, une longueur d’onde unique qui correspond à sa position. « Cela permet de mesurer avec une grande précisions les porosités en surface des pièces imprimées en 3D », met en avant Patrice Belin. « Il s’agit d’une méthode sans contact,. Il n’y a aucun risque d’endommager la pièce ».
STIL veut pousser plus avant sa technologie, et l’intégrer directement dans les équipements pour effectuer en temps réel le contrôle des couches imprimées. « La facilité de mise en œuvre de notre technologie la rend idéale pour l’inspection pendant le processus de production. Elle peut alerter l’opérateur en cas de problème sur une couche et lui permettre soit de régler le défaut, soit d’économiser de la matière en arrêtant l’impression le plus tôt possible. », poursuit Patrice Belin.
La société a déjà approché des constructeurs d’équipements et des discussions sont en cours pour placer cette technologie directement dans la chambre d’impression.